LETTRE OUVERTE: Un appel aux partis politiques pour l’accessibilité des logements et la lutte à l’itinérance pour l’élection 2019

         
 

Monsieur Justin Trudeau, premier ministre du Canada et chef du Parti libéral
Monsieur Andrew Scheer, chef de l’Opposition et chef du Parti conservateur
Monsieur Jagmeet Singh, chef du Nouveau Parti démocratique
Monsieur Yves-François Blanchet, chef du Bloc Québécois
Madame Elizabeth May, chef du Parti vert du Canada

Le 25 juin 2019

Madame,
Messieurs,

La prochaine élection fédérale aura lieu en octobre 2019. Cette élection sera un moment décisif pour les Canadiens et les Canadiennes dans le choix d’une vision du pays pour la prochaine décennie et au-delà.

Un des enjeux les plus importants pour les Canadiens en ce début de campagne électorale demeure l’accès à un logement sécuritaire et abordable. De récents sondages ont montré que l’accessibilité au logement se situe parmi les principales préoccupations des électeurs, particulièrement chez les plus jeunes et les millénariaux. Les Canadiens voudront connaître les positions et les programmes de tous les partis politiques sur cette question fondamentale.

Actuellement, plus de 600 000 ménages vivent dans des logements sans but lucratif ou coopératifs. Au-delà de 235 000 personnes au Canada seront sans abri à un moment ou l’autre dans l’année ; elles ont besoin d’un logement abordable. Les partis politiques doivent adopter des programmes où ils s’engagent à éliminer l’itinérance et à consolider le logement communautaire. À titre d’organisations qui représentent le logement communautaire et la lutte contre l’itinérance au Canada, nous appelons tous les partis politiques à mettre la priorité sur l’accessibilité au logement. Vous pouvez le faire en intégrant les éléments suivants dans vos plateformes électorales et, par la suite, dans les politiques gouvernementales.

  • Un engagement à maintenir le leadership fédéral et les investissements pour accroître l’accès au logement : Cela nécessite d’abord un financement stable et à long terme. Le prochain gouvernement devra maintenir les programmes et les politiques sur le logement et l’itinérance déjà en place, ce qui inclut les politiques conçues pour assurer un logement abordable aux personnes vulnérables et à faible revenu. Cela comprend aussi la législation sur le droit au logement, la Loi sur la stratégie nationale sur le logement récemment adoptée par la Chambre des communes et les mesures de reddition de compte qui protègent ce droit.
     
  • L’élaboration et le financement adéquat d’une Stratégie du logement autochtone dans les milieux urbains, ruraux et nordiques : les Autochtones qui vivent dans ces milieux connaissent de grandes inégalités en matière de logement lorsqu’on les compare aux non-autochtones. Quoique le gouvernement fédéral finalise trois stratégies du logement distinctes, il n’y en a aucune pour les Autochtones, et ce, en dépit du fait que 87 % des Autochtones vivent en milieux urbains, ruraux et nordiques. Nous demandons aux partis un financement dédié au logement autochtone dans ces milieux à la hauteur des besoins et une intégration des peuples autochtones vivant dans ces secteurs à la planification et à la gouvernance des enjeux liés au logement d’une façon qui reflète l’esprit et la lettre de la Commission vérité et réconciliation. Nous réclamons aussi la création ainsi que le financement d’un centre national du logement autochtone qui bénéficierait d’une gouvernance autochtone et assurerait une vue d’ensemble du logement autochtone de même que le renforcement de ses capacités de développement.
     
  • L’augmentation de l’offre de logement communautaire : la demande pour du logement abordable continue de croître au Canada. Les listes d’attente augmentent et la pression s’accentue sur le logement communautaire. Dans le but d’augmenter l’ensemble de l’offre, nous invitons tous les partis à appuyer davantage la construction de nouveaux logements communautaires à l’aide d’une boîte à outils. Celle-ci doit comprendre des programmes et des politiques conçus pour favoriser l’accès au capital, augmenter le financement, et modifier le mandat de l’Initiative des terrains fédéraux pour qu’un plus grand nombre de terrains et d’immeubles soient disponibles à des fins de logements communautaires.
     
  • La protection des logements communautaires existants et l’assurance d’un soutien adéquat pour les logements supervisés : le Canada doit s’assurer que le stock actuel de logements communautaires reste en bon état et demeure accessible pour les personnes et les familles à faible revenu. Pour ce faire, tous les partis doivent s’engager dans le renouvellement à long terme de l’aide au logement pour les ménages à faible revenu ; la mise en place de mesures significatives de réduction de la pauvreté telles que l’augmentation des transferts fédéraux dans le cadre du Transfert canadien en matière de programmes sociaux ; l’augmentation de l’appui et du financement des programmes pour les personnes avec des besoins complexes, comme celles qui ont besoin d’aide pour garder leur logement et vivre indépendamment ou celles qui sont en transition pour sortir de l’itinérance ; et le maintien du financement de la rénovation et de la remise en état des logements existants.

L’engagement à mettre fin à l’itinérance au Canada : quelque 235 000 Canadiens ou Canadiennes connaîtront une période d’itinérance cette année à un coût estimé de 7 milliards de dollars par année. Dans la Loi sur la Stratégie nationale du logement, le gouvernement s’est engagé à mettre en place progressivement le droit au logement. Selon le droit international des droits de la personne, cela signifie que l’on doit donner la priorité aux groupes les plus vulnérables et aux personnes qui ont les plus grands besoins dans une politique de l’habitation. L’itinérance est ainsi reconnue comme une violation des droits de la personne, il faut l’éliminer le plus rapidement possible.

Mettre fin à l’itinérance est un objectif accessible. Des communautés canadiennes ont déjà connu des succès dans la prévention et la réduction de l’itinérance. Edmonton, en Alberta, a réduit l’itinérance de 43 % depuis 2009 ; Kawartha Lakes et Haliburton County, en Ontario ont réduit de plus de 50 % l’itinérance chronique en 6 mois seulement et Guelph Wellington, toujours en Ontario, a diminué l’itinérance chronique de 24 % en seulement sept mois. Tous les partis doivent s’engager à mettre fin à l’itinérance au Canada d’ici 2030 grâce à un leadership fédéral avec l’expansion de Vers un chez-soi et l’augmentation de l’investissement en capital dans le logement abordable.

Dans les prochaines semaines, nous enverrons un questionnaire aux candidats et aux candidates de tous les principaux partis politiques dans chaque circonscription pour connaître leurs opinions sur ces questions politiques fondamentales. Nous avons hâte de recevoir leur réponse et de partager leur vision du logement communautaire et de l’itinérance avec les Canadiens et les Canadiennes.

Merci de prendre le temps de lire cette lettre. Nous espérons travailler avec vous, vos candidats et les membres du prochain gouvernement dans un but commun : consolider le logement communautaire et mettre fin à l’itinérance au Canada.

Nous vous prions de recevoir, Madame, Messieurs, nos salutations distinguées,


Robert Byers

président, Caucus autochtone, Association canadienne d’habitation et de rénovation urbaine


Jacques Beaudoin
Secrétaire général, Réseau québécois des OSBL d’habitation


Jeff Morrison
Directeur général, Association canadienne d’habitation et de rénovation urbaine


Tim Richter
Président, Alliance canadienne pour mettre fin à l’itinérance


Tim Ross
Directeur général, Fédération de l’habitation coopérative du Canada