Maisons Canada : Un départ solide pour le logement communautaire

22 Sep 2025

L’annonce de l’initiative Maisons Canada par le gouvernement fédéral marque une étape importante dans la lutte contre la crise du logement. Depuis des années, l’ACHRU et ses membres appellent à un leadership national plus affirmé pour garantir à chaque personne au Canada un logement sûr et abordable. Le lancement de Maisons Canada envoie un signal clair : le gouvernement est prêt à mettre le logement communautaire au cœur de ses priorités, en mobilisant de nouveaux outils, ressources et approches pour concrétiser cette vision.

L’ACHRU a plaidé avec constance pour que soit reconnu le rôle unique des organismes à but non lucratif capables de construire des logements rapidement, à grande échelle, de manière abordable, durable et adaptée aux besoins des communautés d’un océan à l’autre.

Au cours des derniers mois, nous avons collaboré étroitement avec les représentants du gouvernement alors que Maisons Canada prenait forme, en partageant l’expertise de terrain des fournisseurs de logements communautaires. Nous sommes encouragés de voir plusieurs de nos recommandations intégrées à la conception de cette nouvelle agence. Nous restons néanmoins vigilants : le succès de Maisons Canada dépendra des détails de sa mise en œuvre.

Ce qui inspire la confiance

Une priorité accordée au logement communautaire

Le Premier ministre s’est engagé à ce que Maisons Canada « se concentre principalement sur le logement communautaire » — un message que l’ACHRU porte depuis plus de six mois. Nous saluons cet engagement, car il reflète une compréhension essentielle : seule une offre protégée de la spéculation et de la volatilité du marché peut garantir une véritable abordabilité à long terme.

Le mandat officiel de Maisons Canada est de :

« Accroître la proportion de logements communautaires, sociaux et abordables pour les ménages à revenu faible et moyen »;
« Créer les conditions propices à un secteur du logement communautaire robuste, en croissance, fondé sur des partenariats innovants, et moins dépendant des subventions récurrentes ».

Si l’objectif de réduire la dépendance aux subventions mérite une attention particulière, ce mandat s’aligne sur nos appels à plus que doubler l’offre de logements communautaires et à bâtir un secteur fort et résilient.

Une définition claire de l’abordabilité

Nous avons demandé qu’une seule définition, fondée sur le revenu, soit adoptée. Le choix du modèle développé par l’Université de la Colombie-Britannique dans le cadre du projet HART répond à cette demande. Cette approche assurera la cohérence, souvent absente des programmes fédéraux, et garantira que les ressources ciblent les ménages à faible et moyen revenu qui en ont le plus besoin.

Des logements de soutien et de transition

L’inclusion du logement de soutien et du logement transitoire dans le mandat de Maisons Canada, assortie d’un investissement initial d’un milliard de dollars, constitue une avancée majeure. Cet engagement, défendu par l’ACHRU et repris par le ministre Gregor Robertson ainsi que par le Premier ministre, est essentiel pour répondre aux besoins des personnes en situation d’itinérance.

Une approche par portefeuilles

L’adoption d’une logique de portefeuilles de projets, combinée à des processus accélérés, représente une avancée décisive. Cette approche réduira la lourdeur administrative, offrira de la prévisibilité et permettra aux organismes de planifier à long terme. Nous nous réjouissons également de la mise en place d’un guichet unique fédéral regroupant l’accès aux terrains, aux financements et, surtout, aux fonds de pré-développement.

Une meilleure coordination intergouvernementale

Nous saluons la volonté du gouvernement de mieux harmoniser les exigences entre les différents ordres de gouvernement et d’adopter une approche plus équilibrée face au risque. Ces ajustements sont essentiels pour déployer le logement communautaire à grande échelle et pour améliorer les ententes fédérales-provinciales et fédérales-territoriales de la Stratégie nationale sur le logement.

Une tolérance accrue au risque

Les organismes communautaires ont longtemps dénoncé l’approche trop restrictive de la SCHL en matière de gestion des risques. Si Maisons Canada adopte une tolérance plus élevée — par exemple en assumant un rôle de « premier en ligne » ou de « première perte » —, cela permettra de mobiliser davantage de capitaux privés et philanthropiques. Les premiers signaux en ce sens sont encourageants.

Ce qui doit être surveillé de près

Le logement autochtone

Maisons Canada doit s’engager fermement envers le logement communautaire autochtone en milieu urbain, rural et nordique. L’ACHRU demande qu’au moins 20 % des ressources soient allouées à des projets dirigés par et pour les Autochtones, avec des modèles de gouvernance adaptés.

Le rôle de promoteur fédéral

Le modèle de construction directe envisagé par le gouvernement pourrait accélérer les projets s’il est bien conçu. Mal pensé, il risquerait d’alourdir la bureaucratie et de nuire au secteur communautaire. Les organismes doivent être impliqués dès la conception, et les ententes doivent favoriser la flexibilité et, à terme, le transfert de propriété au secteur communautaire.

Le financement et la capacité à livrer

Avec un capital initial de 13 milliards $, Maisons Canada doit prouver sa capacité à construire rapidement et à grande échelle. Les résultats devront dépasser ceux des cinq dernières années. Cela nécessitera non seulement du financement, mais aussi un investissement direct dans la capacité organisationnelle du secteur.

La continuité des projets

Le Canada ne peut se permettre de retards sur les projets déjà prêts. Les nouvelles normes de construction doivent être introduites progressivement afin de ne pas bloquer les chantiers imminents.

Conclusion

Maisons Canada est une occasion historique de transformer durablement le paysage du logement au pays. Mais pour tenir ses promesses, l’agence doit :

-placer l’abordabilité réelle au centre;
-garantir un leadership autochtone fort;
-soutenir aussi bien les grands développeurs que les plus petits organismes;
-adopter une approche équilibrée face au risque;
-et offrir des mécanismes efficaces pour mobiliser les ressources fédérales.

Un secteur communautaire plus solide signifie non seulement plus de foyers abordables dès aujourd’hui, mais aussi une base sociale et économique plus stable pour demain.

L’ACHRU et ses membres continueront à faire entendre leur voix, à partager leur expertise de terrain et à dialoguer avec Maisons Canada dans toutes les tribunes disponibles — qu’il s’agisse de la Journée de l’habitation sur la colline, du Congrès annuel ou d’autres forums.

Maisons Canada est un départ prometteur. Bien conçu et bien mis en œuvre, il pourrait devenir le tournant décisif dont notre pays a besoin pour bâtir un Canada plus juste, inclusif et durable.