Nouveaux outils pour avancer vers un toit pour tous et pour toutes
16 mars 2023
Carolyn Whitzman, experte-conseil, Outils d’évaluation des besoins et des ressources en logement (HART)
En 2019, le Canada a adopté la Loi sur la Stratégie nationale sur le logement, qui engage tous les gouvernements du Canada « à continuer de faire avancer la réalisation progressive du droit à un logement adéquat » en insistant sur « l’amélioration des conditions de logement pour les personnes les plus vulnérables ». Cependant, plusieurs évaluations partielles récentes de la Stratégie nationale sur le logement montrent clairement que tous les ordres de gouvernement, local, régional, provincial, territorial et fédéral, ont échoué à offrir un logement abordable ou adéquat aux personnes qui sont mal logées ou en besoins impérieux de logement. Comme le récent Plan directeur pour le logement de l’ACHRU l’a montré, il nous faut une nouvelle approche.
Au cœur du problème se trouvent l’absence de données reproductibles, comparables et axées sur l’équité quant à la mesure des besoins en logements de même qu’un manque de compréhension des politiques qui permettraient d’offrir des logements correspondant aux types de besoins et aux types de logements, dans les bons endroits.
Le programme Outils d’évaluation des besoins et des ressources en logement (HART), basé à l’Université de Colombie-Britannique, vise à régler ce problème. Le mercredi 29 mars à 10 h (heure du Pacifique) ou 13 h, heure de l’Est, nous lancerons notre nouveau site Web avec trois outils pour aider les gouvernements, les organismes communautaires et les développeurs à mieux faire face aux crises du logement abordable et de l’itinérance que vit la population canadienne. Inscrivez-vous ici.
Outil d’évaluation des besoins : une nouvelle façon de planifier le logement abordable
Le premier outil est notre outil d’évaluation des besoins qui analyse les données du recensement sur les besoins impérieux en logement selon les catégories de logement, la taille des ménages et les groupes prioritaires. Actuellement, la plupart des programmes gouvernementaux n’utilisent pas la définition standard de la SCHL sur le « logement abordable » qui correspond à 30 % du revenu du ménage avant les impôts. Ils ne prêtent pas non plus attention aux catégories de revenus très faibles ou modiques, comme les programmes de logements abordables l’ont fait de 1940 à 1990, avant que le gouvernement fédéral n’abandonne sa responsabilité pour une politique nationale de l’habitation.
Voir les catégories de revenu et les coûts de logement pour le Canada, basés sur le recensement 2016
Nous utilisons cinq catégories, chacune basée sur le revenu régional médian des ménages (RRMM), puisque les revenus varient beaucoup d’une région à l’autre :
- Très faible revenu : ces ménages, gagnant moins de 20 % du RRMM, reçoivent pour la plupart des revenus fixes. Depuis les années 1990, les taux d’aide sociale n’ont pas suivi l’inflation, même lorsque les loyers à faible coût ont été perdus ; la plupart de ces ménages sont donc à risque d’itinérance.
- Faible revenu : ménages gagnant de 21 à 50 % du RRMM, le seuil de faible revenu ou de pauvreté. Plusieurs gagnent le salaire minimum qui, lui non plus, n’a pas suivi la hausse du coût du logement.
- Revenu modique : Ces ménages gagnent entre 51 et 80 % du RRMM et ont aussi profité dans le passé du logement public ou d’autres logements sans but lucratif.
- Revenu médian : Ces ménages gagnent entre 81 et 120 % du RRMM et ont traditionnellement été capables d’acheter leur logis. Toutefois, l’achat d’une première propriété est maintenant inaccessible dans la plupart des communautés canadiennes, obligeant plusieurs jeunes familles à de longues navettes.
- Revenu élevé : Ces ménages gagnent plus de 121 % du RRMM. Dans plusieurs grandes villes canadiennes, même les ménages à revenu élevé qui sont locataires actuellement trouvent l’achat d’une propriété inaccessible.
Notre outil d’évaluation des besoins en logement permet d’établir le calcul des coûts abordables d’un logement dans chaque communauté canadienne.
Nos données montrent que la plupart des ménages en besoin impérieux de logement sont à revenu très faible, faible et modique. Il n’y a tout simplement pas assez de logements disponibles pour les personnes seules et pour les ménages de plusieurs personnes. Si le gouvernement fédéral veut atteindre son objectif de 530 000 ménages libérés des besoins impérieux de logement d’ici 2028 (sur un total de 1,7 million de ménages en 2016), sans parler de la réduction de moitié du nombre de sans-abri chroniques (au moins 25 000 personnes, non incluses dans le calcul des besoins impérieux de logement), ou sans répondre aux besoins des étudiants, des personnes vivant dans des logements collectifs tels que les maisons de soins de longue durée, ou des agriculteurs (dont aucun n’est inclus dans le calcul des besoins impérieux de logement), il aura besoin d’objectifs clairs en matière de loyers et de taille des ménages.
Notre outil d’évaluation des besoins en habitation permet de calculer les déficits par catégories de revenus et taille du ménage pour chaque communauté au Canada. Nous projetons aussi, sur la base de 10 ans de données, les changements dans les ménages qui ont des besoins impérieux en logement ainsi que les variations à l’intérieur des régions (p. ex., les ménages de grande taille ou ceux avec des revenus plus bas quittent les grandes villes pour les régions autour).
Le gouvernement fédéral s’est aussi engagé envers une approche fondée sur l’équité entre les sexes et l’intersectionnalité. Il a annoncé des sous-objectifs. Par exemple, 33 % de tout le financement fédéral doit être dirigé vers les femmes chefs de famille. Les personnes souffrant de troubles physiques, cognitifs ou mentaux et les chefs de famille âgés de plus de 85 ans peuvent avoir des besoins supplémentaires en matière de soutien. Le gouvernement fédéral a aussi promis d’appuyer une vision distincte du logement pour les Autochtones et par les Autochtones et plus récemment, il a créé un fonds pour les projets de logement dirigés par des personnes noires.
Notre outil d’évaluation des besoins en logement fournit des données sur les populations prioritaires ayant des besoins impérieux en matière de logement pour chaque communauté au Canada, afin de permettre l’élaboration d’objectifs et de sous-objectifs provinciaux ou territoriaux, régionaux et municipaux.
L’outil d’évaluation des terrains : le moyen le plus efficace pour les gouvernements de répondre aux besoins en matière de logement
Sur le plan international, on s’accorde à dire que l’utilisation de terrains publics pour des logements à but non lucratif et abordables est le moyen le plus efficace de répondre aux besoins des ménages à revenus faibles et modiques. En effet, la combinaison d’un terrain gratuit (donné ou loué gratuitement) et d’un développement sans but lucratif peut permettre de couvrir jusqu’à 50 % du coût des nouveaux logements.
Une capture d’écran de notre outil d’évaluation des terrains montrant des terrains bien placés à Ottawa et disponibles pour construire du logement abordable.
Notre outil d’évaluation des terrains montre comment identifier des terrains publics bien situés qui conviennent à l’augmentation du nombre de logements sans but lucratif, y compris des logements situés « au-dessus d’infrastructures existantes » telles que des centres de santé, des bibliothèques et des casernes de pompiers. En collaboration avec 12 partenaires gouvernementaux, nous avons identifié des milliers de sites qui pourraient être utilisés pour développer de nouveaux logements abordables, orientés vers les transports en commun, afin de répondre aux besoins de sans-abri ou de personnes en grande difficulté de logement, et de relancer le type d’offre la plus utile pour les communautés durables de l’avenir du point de vue social, économique et environnemental.
Outil d’acquisition : arrêter l’hémorragie de logements abordables
Entre 2011 et 2016, 15 logements abordables loués à 750 $ ou moins par mois ont été perdus pour chaque logement à but non lucratif créé au Canada, et le gouvernement a été largement absent du développement et de l’acquisition de logements abordables depuis les années 1990. De plus en plus de voix s’élèvent pour réclamer une stratégie nationale d’acquisition qui permet de transférer au secteur non lucratif les logements locatifs qui risquent de perdre leur caractère abordable. Plusieurs gouvernements au Canada, dont la Colombie-Britannique, la Nouvelle-Écosse et Toronto, ont lancé leurs propres stratégies d’acquisition.
Notre outil d’acquisition analyse les meilleures pratiques canadiennes et internationales afin de fournir des fiches d’information faciles à utiliser pour les gouvernements qui envisagent de soutenir l’acquisition de logements locatifs à bas loyer. Il couvre l’identification des propriétés appropriées, le financement de l’acquisition rapide des propriétés sur le marché, et les considérations pour maintenir l’abordabilité des logements tout en améliorant leur état et leur durabilité environnementale.
Pour plus d’informations sur la façon dont les outils d’évaluation des besoins et des ressources en logement peuvent être utiles pour votre communauté, veuillez communiquer avec nous à HART@allard.ubc.ca, vous inscrire à notre lancement ou assister à notre session au Congrès de l’ACHRU à Winnipeg du 18 au 20 avril !